Le samedi 29 mai dernier, la manifestation « KA KI KA », organisée par le Comité de quartier de Belle-Plaine a tenu toutes ses promesses et particulièrement la conférence débat autour de la thématique de la transmission du patrimoine culturel immatériel.

Dès le matin, le public a pu se balader à travers les différents stands placés sur le « carré » de Belle-Plaine. On pouvait y découvrir l’atelier ka avec l’association K-Sonné, l’atelier chacha avec Pascal Cimpper, des stands de vente de bijoux en bois et graines, ainsi que la vente de fleurs et de plantes. L’association K-Sonné, spécialisée dans l’artisanat d’art et les produits agro transformés comme le sirop batterie a fait une démonstration de fabrication de tambour en bois fouillé avec du bois de kajou.

L’après-midi artistique a débuté par une prestation du slameur Ti Malo. Pourtant très connu et de bonne facture, les déclamations de Ti Malo n’ont pas ameuté la foule, en raison non seulement du temps incertain mais aussi des préoccupations de la population à préparer les festivités du lendemain, la fête des mères. En avant première, l’auditoire a découvert un fabuleux texte sur les événements de Mai 67 et bien sûr des textes plus connus comme « Ti Mal la vi ».

Suite aux prestations de slam, José SEVERIEN, adjoint au maire et Vice Président de la commission tourisme et Marie-Flore DÉSIRÉE adjointe au maire et Vice Présidente de la commission Culture ont mis l’accent sur l’importante mission qu’ont les associations de promouvoir la culture au Gosier et de leur rôle incontournable sur la transmission de cette culture aux jeunes générations.

En tout début de soirée, la conférence débat intitulée « An nou sonjé dèmen », réunissait des intervenants de choix, déjà connus pour leur implication dans la vie culturelle guadeloupéenne :
  Raymonde Pater Thorin, Directrice de l’école de danse Kamodjaka et marraine de la manifestation
  Stella Moutou, membre de l’école de danse de Léna Blou, Technik Ka
  Carole Martial, professeur de danse traditionnelle à l’école de AJSF
  Félix Cotellon, organisateur du festival de Gwo Ka et initiateur du centre culturel « La repriz »
  Christian Dahomay, chercheur sur le gwo ka.

« La transmission sans appropriation n’est qu’un leurre », tels sont les propos de la marraine de la manifestation Raymonde Pater Thorin en guise d’introduction. Le gwo ka n’est pas seulement une danse, ou une musique, mais un ensemble indissociable et indissocié. Pour pouvoir transmettre le gwo ka, il faut être imprégné de la culture créole dans son ensemble et surtout avoir de solides connaissances. Le gwo ka, qu’il soit chanté, dansé ou mis en musique répond à des règles qui n’ont malheureusement pas été suffisamment formalisées. L’exemple de la « ronde de léwoz » illustre bien ce précepte où c’est le danseur qui impulse le rythme alors qu’en représentation groupée, c’est le marqueur qui donne mesure. Raymonde Pater Thorin propose alors de mettre un vocable bien précis sur les gestes de la ronde de léwoz notamment et surtout « à cause de l’oralité qui se perd » précise Christian Dahomay. Ainsi, le « bigidi a moun sou », le « voyé kristal » ou le « kanté andidan » devront être les schémas formels pour une reconnaissance de cette danse traditionnelle. Par ailleurs, la technique à elle seule ne permet pas de tout transmettre, « si on n’est jamais allé dans un léwoz, on n’aura pas le sentiment du léwoz en nous » a renchéri Christian Dahomay. Mais comment transmettre l’émotion et le ressenti ?

Aujourd’hui, avec la multiplicité des écoles de danses traditionnelles sur le département, la formation des formateurs est devenue indispensable non seulement pour répondre à la forte demande mais aussi, pour « reproduire » correctement le patrimoine. De plus, il n’est pas aisé de trouver les bons outils, parce que justement soit ils sont extrêmement rares ou quasi inexistants pour d’autres. Carole Martial, enseignante à l’AJSF pointe le doigt sur cette carence avérée en la matière. C’est en ce sens, que Léna Blou a publié un ouvrage : « Recherches sur l’émergence d’une méthode d’enseignement à partir des danses Gwo Ka » - éditions Jasor, 2005. L’ouvrage de Christian Dahomay « Métod ka » a été réédité. Et c’est grâce aux repères et aux personnes ressources qu’ils ont pu faire ce travail de terrain, de collecte du patrimoine culturel immatériel pour la postérité. Les personnes ressources rencontrées sont Jacqueline Cachemire-Thole, Robert Loyson, Kaya, Chaben, Bébé Rospart, Cunnington (pédagogue de l’improvisation), Odile Duboc, Sopta, Marcel Lollia … et bien d’autres encore.

La soirée du Ka Ki Ka s’est poursuivie par des représentations des différentes écoles de danses traditionnelles et par un grand Léwoz de Kannida.