Pour sa fête patronale 2010, la ville du Gosier a opté pour un thème détonant dans le contexte morose actuel : « Cultivons le rire pour mieux vivre ensemble ».
Parmi les nombreuses manifestations déclinant le thème, l’une d’entre elle l’abordait de manière sérieuse et profonde : la Table Ronde du 13 août sur le Champ du rire. Des invités de prestige avaient répondu à l’invitation de la Ville : Marie-Hélène JACOBY-KOALY, sociologue et docteur en sciences de l’éducation, Isabelle KANCEL, comédienne, Jean-Pierre DIARA, pédiatre, Roger TOUMSON, écrivain, et José JERNIDIER, dramaturge. Le débat était ponctué par la projection d’extraits d’un micro-trottoir réalisé par la Ville, qui permettait à des Gosiériens de donner leur avis sur la question.

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Contrairement aux apparences, c’est un sujet complexe et très sérieux que celui du rire, décortiqué à l’envi par les invités. Premier constat : le rire est paradoxal. Rapprochant les contraires, la comédie n’est jamais bien loin de la tragédie. D’ailleurs, ne pleure-t-on pas de rire ?

Spontané, le rire est également orienté par la culture et l’éducation. Outil de socialisation et de rapprochement, le rire est un code langagier. Cela implique de partager une culture du rire inscrite dans notre imaginaire collectif et faisant appel à des symboles partagés.

Mais le rire remplit aussi une fonction éminemment critique. Le rire le plus pertinent est, selon Roger TOUMSON, le rire sardonique, qui remplit une fonction critique et permet d’opérer une inversion des rôles, notamment dans le rapport dominant / dominé. Abondant dans son sens, José JERNIDIER a évoqué le rire « masco » de l’esclave, qui visait à tromper le maître par son apparente légèreté et insouciance.

Pratiqué sans lâcheté ni grossièreté, le rire fait appel à l’intelligence. Vecteur de messages, il permet aussi le rapprochement des individus. Car si l’on se cache généralement pour pleurer, c’est souvent ensemble que l’on préfère rire. Sans compter que le rire est aussi un instrument de séduction. Un médecin présent dans l’assistance a même indiqué que certaines de ses patientes ont constaté une dégradation de leurs rapports sentimentaux dès lors que leur compagnon les faisait moins rire.

Une défaillance qui peut avoir un impact doublement négatif, dès lors que selon certaines études, évoquées par le Docteur DIARA, les personnes qui rient le moins seraient les plus sujettes aux accidents cardiaques. Par ailleurs, saviez-vous que le viagra (monoxyde d’azote, NO) libère la même molécule que le gaz hilarant (protoxyde d’azote, N2O) ? Celles-ci sont tout simplement inversées … Alors, rire et plaisir, même combat ?

Les travées pleines de la salle Léopold HELENE auront prouvé à tous les sceptiques la justesse et la pertinence du thème choisi par la commission culture. Marie-Flore DESIREE, élue déléguée à la culture, s’est déclarée « ravie de la tenue et de la teneur de ce débat, avec des interventions riches, pertinentes et un plateau de choix. Face aux spécialistes, le public était aguerri et avait envie de débattre ».
Cette envie se mesurait d’ailleurs à la distance qu’ont parcouru certains membres de l’assistance, comme Jacqueline TASSIUS, venue avec ses amies depuis Vieux-Habitants : « J’ai trouvé ce thème très audacieux pour une fête patronale car il fallait le traduire en actes et le décliner au travers des différentes manifestations. Le débat ce soir était très riche, et les intervenants de grande qualité, notamment M. TOUMSON. Bravo aux organisateurs ! »